| Sujet: dead king eats the gods. Jeu 18 Fév - 18:19 | |
| SELVY VINGT-CINQ ANS BARMAN (réinsertion professionnelle)
D’où vient-elle, cette persuasion, ce sentiment profond et effrayant que tu as toujours été ça. Un mélange inutilement complexe d’une unité imaginaire et d’un réel nul ? Accroché à toi, insupportable proton maladif, il y a ce réel qui ne compte pas. Il y a le souvenir de Jenna, ta moitié qu’un big bang stupide a arraché de toi. Il y a ton âme-horcruxe lâchée seule dans l’immensité du monde, à la recherche d’un neutron auquel se coller, avec qui fusionner. La vie sera belle, avant. Quand Jenna gueulait en te trainant derrière par le col un peu moisi de ta chemise plus vraiment blanche. Qu’est-ce que tu l’emmerdais, « bordel de merde », à trainer dans ses pattes et à lui ruiner tous ses coups. Tu pourrais écrire un livre sur ton enfance, un livre qui ne serait jamais lu par personne, un manuscrit qui ferait hausser le sourcil des éditeurs et qui plongerait, finalement, dans le bac des refusés. Ton réel est trop vrai, trop grand, ta banalité dévorante. Tu voudrais être un personnage, mais que pourrait-on dire de toi ? Qui voudrait t’écrire ? Qui oserait se heurter à une réalité si pleine, s’afficher avec ta dépendance au monde, ton absence de combat, de vision, de révolte ? Tu voudrais une histoire, mais l’histoire ne t’a pas attendue. Tu sais, si le labyrinthe est raconté, c’est que Thésée en est sorti. Selvy est perdu dans les dédales interminables du labyrinthe vital, heurté par cet hétérogène qui le compose et le classe parmi les autres chiffres. Nombre imaginaire pur, ton réel ne nous intéresse pas. Tes errances n’ont rien de mythologiques. Tes pas ne laissent pas de nouveaux creux dans le chemin des Hommes. Oh, si seulement l’écriture pouvait naitre du rien ! Mais dès lors qu’il s’écrit, le rien s’incruste dans le quelque chose, le temps se fige, le héros entre dans l’histoire et dans les lignes. Ton essence est math et matique, une répétition en -ique. Une leçon de science et de connaissances donnée à ceux qui savent déjà. Le numéro parmi les numéros qui chiffrent ce monde. Tu ne dé-chiffreras jamais. Tu existes, et, au fond de toi, tu trouves ça beaucoup. acheter des clopes. t’as fini par t’y faire, pas vrai. ce pipeau sale pour lequel t’aurais tout donné, là bas, comme tout le monde. bien obligé d’effacer de toi ce moi qui prend trop de place, fait de toi une proie visible. se fondre dans la foule en survêt. compacte et uniforme. elle est jolie la fille qui te sert, assez pour que tu le remarques avec tes yeux qui ont cessé de regarder ce qu’ils voient. ces traits noirs au-dessus des yeux, ça donne un côté porn à ses airs kitty, t’aurais aimé qu’elle vienne te voir au parloir, que tout le monde la mate et qu’elle n’observe que toi. là, on est dans le monde réel. trop belle pour toi. un sourire en coin un peu tordu comme du fil de fer rigide qu’on tente d’assouplir, et tu dégages en lui tournant le dos vite fait. tu reviendras, tu bosses à côté. t’en fais ton QG à clopes, parce que croiser son regard, même une seconde, ça te fait oublier tout ça. tu te souviens sans arrêt. tu t’entends encore, « celui qui touchera à ma sœur, je le tuerai ». forcément tu savais pas. il a bien fallu le faire, quand ça a été l’heure, quand quelqu’un l’a touchée, bien plus que touchée, quand un autre que toi l’a tuée. rester fidèle à toi-même. tu sais même pas ce que ça veut dire. ta rage, sourde et aveugle, te revient en pleine gueule, te laisse aucun répit. le coup de couteau et le rictus du mort qui se figent dans l’atmosphère suspendue, la lame dans son cœur – ce que tu crois son cœur avec tes idées d’enfant – le rire sadique auquel personne ne répondra plus jamais. la prison. retenir sa respiration pour ne jamais exister trop fort. ne pas fermer les yeux, ne surtout pas fermer les yeux dès que quelque chose t’appartient, de peur qu’on te le prenne. pas vouloir sucer, et devoir se battre pour garder ça. au moins ça, putain. ne jamais regarder, trop dangereux de regarder, la mauvaise personne, au mauvais moment. l’armée de psychiatres qui se succède autour de toi, qui sait avant toi ce qu’il y a en toi. les questions qui ont fait si souvent remonter la bile à tes lèvres, les délires autour de ta sœur, crime passionnel, réincarnation de la figure de la mère, relation oedipienne. l’avocat te répétant patience. coopère. reste calme. ils t’auront pas trouvé d’instabilité psychologique, pas vrai ? t’es juste un orphelin abandonné à leurs yeux, qui avait perdu tout ce qu’il avait quand sa sœur est partie. la drogue dure, c’est devenu ta hantise. les junkies titubant dans le noir des bas fonds, la peau grise et les joues creuses, les zombies de tes cauchemars de gosse. tu te concentres l’air de rien sur la vendeuse de clopes. son visage n’a rien qui te rappelle l’enfer. c’est si bon. the smiths , what difference does it make dr feelgood , all through the city the last poets , no more prisons foxygen , san francisco
pseudo: holster. / localisation : from mars / tu fais quoi dans la vie ? : j'traine dans le coin / un joli mot : ma lune
Dernière édition par Selvy le Ven 19 Fév - 9:48, édité 2 fois
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| Sujet: Re: dead king eats the gods. Jeu 18 Fév - 20:17 | |
| ptn d'merde .. tes mots ils sont beaux. et écrire sur un gamin dont personne ne voudrait lire le livre de sa vie j'trouve ça dingue bienvenue merci et bravo |
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| Sujet: Re: dead king eats the gods. Ven 19 Fév - 9:31 | |
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| Sujet: Re: dead king eats the gods. Ven 19 Fév - 14:42 | |
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| Sujet: Re: dead king eats the gods. Ven 19 Fév - 16:23 | |
| mes chaussures neuves te remercient de cette délicate attention envers elle mais mon ego veut tes critiques, gal. |
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| Sujet: Re: dead king eats the gods. Ven 19 Fév - 17:53 | |
| oh oui c'est merveilleux !!!
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| Sujet: Re: dead king eats the gods. | |
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